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«Jeudi le 23 juillet 2020 à 23 h, je reçois l’appel tant attendu depuis plus d’un an et demi! Je suis la première greffée à l’Hôtel Dieu de Québec en pleine pandémie du COVID-19!»

À l’âge de 25 ans, je ne connaissais absolument rien du don d’organes. Je débutais ma carrière d’enseignante d’anglais, langue seconde. J’avais la tête pleine de projets et d’ambition. Puis, un jour, le médecin m’a annoncé que mes reins ne fonctionnaient qu'à 40 % et qu'une greffe rénale serait nécessaire éventuellement. Personne ne m’avait jamais parlé de transplantation d’organes auparavant. C’était un sujet qui ne me concernait pas, qui n’avait jamais été abordé ni à l’école, ni dans ma famille, ni dans mon entourage...

Mes reins perdent rapidement de leur fonction, ce qui déclenche le processus pour avoir une greffe. En novembre 2018, je suis officiellement inscrite sur la liste d’attente. C’est à ce moment-là que j'ai compris vraiment l’importance du don d’organes.

En mars 2019, ma vie chamboule complètement, comme si la terre s'est arrêtée de tourner. C'est le début de la dialyse avec un cathéter dans la veine jugulaire. Je dois me rendre à l’hôpital trois fois par semaine pour mes traitements. Je dois arrêter de travailler, la maladie m’envahit.

Je retourne finalement au travail en septembre 2019 et je débute l’hémodialyse à domicile. Je dois tout gérer—le branchement, le matériel, les problèmes de la machine, l’entretien, etc. Je suis enseignante d’anglais le jour et bien malgré moi, infirmière d’hémodialyse le soir. Je dois tout maitriser puisque ma vie est entre mes mains. 

En novembre 2019, mon cathéter s’infecte et on décide qu’une fistule au bras est nécessaire. Ma maladie m’empêche encore de vivre normalement. De retour à l’hôpital trois fois par semaine pour apprendre cette nouvelle technique qui nécessite deux ponctions au bras. Je dois donc apprendre à me piquer pour me traiter chez nous, une étape psychologiquement ardue.

J’ai l’impression que ce cauchemar ne finira jamais et que mon sablier se vide plus vite que jamais. Une machine me garde en vie, mais fait du tort à mon corps. Une femme qui débute la dialyse à 30 ou 34 ans et qui reste en dialyse toute sa vie a une espérance de vie de 16 ans. Elle peut donc espérer vivre jusqu’à environ 45 à 50 ans. 

À mon retour au travail en janvier 2020, je découvre le merveilleux programme Chaîne de vie. J’apprends que ce programme à pour mission d’enseigner dans nos écoles un sujet encore parfois tabou : le don d’organes et de tissus. Selon moi, Chaîne de vie est le début d’un avenir meilleur. En tant qu’enseignante d’anglais en attente de greffe rénale, je comprends l’immense impact que ce programme aura dans notre société. J’ai une reconnaissance inimaginable pour Lucie Dumont et son équipe, qui donne la possibilité aux jeunes d’apprendre, d’entendre des témoignages sur le don d’organes et de tissus, de réfléchir sur les enjeux et d’initier des discussions en famille sur le sujet. Je crois que cette sensibilisation en milieu scolaire aidera grandement aux problèmes de la liste d’attente. De plus, ce programme est bien structuré pour encadrer les enseignants et il comprend toutes les étapes détaillées pour bien guider les adolescents dans leur réflexion et une prise de position éclairée et personnelle sur le don d'organes et de tissus.

Jeudi le 23 juillet 2020 à 23 h, je reçois l’appel tant attendu depuis plus d’un an et demi! « Nous avons un rein en parfaite santé pour vous; dirigez-vous à l’Hôpital, nous allons t’opérer à 6 h demain matin. »

Je suis la première greffée à l’Hôtel Dieu de Québec en pleine pandémie du COVID-19!

Toutes mes pensées vont à la famille de mon donneur qui vivent un profond deuil, mais qui ont dit OUI au don d’organes. Cet inconnu et sa famille m’ont donné une deuxième chance à la vie. Le 24 juillet 2020, c'est ma nouvelle date d’anniversaire, un nouveau début, une nouvelle vie. Je vous promets que j’en prendrai bien soin et que je serai reconnaissante toute ma vie pour votre geste. Merci à mon ange qui m’a sauvé la vie.

Émilie Lefebvre,
enseignante d'anglais, langue seconde
École secondaire du Rocher, Shawinigan

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