Relevez le Défi Chaîne de vie au mont Vallée du Parc !

Nous avons tous une histoire à raconter et peu importe le moment où celle-ci se termine, il y a de la continuité à chaque passage. La valeur du don d’organes permet justement de prendre conscience de l’importance de continuer à apporter des couleurs aux autres. À première vue, Michaël était perçu des autres par son incroyable talent en tant que musicien, apprêtant la musique comme s’il avait un lien étroit avec les notes et les instruments. Il avait une compréhension des sonorités qui fascinait les gens autour de lui. 

Mais avant tout, il était un fils, un frère, un conjoint et un ami intelligent avec un sens de l’humour particulièrement coloré. Un jeune homme dont le rire communicatif se mariait à merveille avec ses blagues plus farfelues les unes que les autres. Pince sans rire, analyste et de bonne compagnie, son amour pour les animaux avait moyen de faire sourire tous ceux autour de lui. On pouvait le voir régulièrement taper ses pieds sur le sol, rappelant les percussions d’une chanson qui traînait dans sa tête, susurrant des mots doux à un de ses chiens ou à son oiseau. La simplicité dans l’affection et la fidélité des petites créatures de ce monde lui apportaient réconfort, comme pour beaucoup d’entre nous. 

Chaque individu est unique, mais j’ai envie de croire que tout le monde ait croisé le passage d’un Michaël dans sa vie. Une personne talentueuse dont nous avons envie de s’entourer avec la capacité d’entreprendre des conversations poussées allant jusqu’à presque philosopher. Je le souhaite à tous, du moins. Entre la musique, son temps avec sa famille, sa conjointe, ses animaux, ses amis et son travail manuel, étant doué avec tous les concepts de filages et de minutie, ce jeune passionné et sensible portait sur ses épaules la force de la vie et de la vulnérabilité de part sa belle sensibilité. 

Curieux et intéressé, son regard noisette et sa chevelure châtaine en bataille planent toujours dans la mémoire de tous ceux qui l’ont aimé et qu’il a aimé en retour. C’est ainsi qu’à 27 ans, lorsque sa route s’est abruptement arrêtée, nous nous sommes retrouvés à digérer le lot d’informations et à devoir prendre une décision : Pouvons-nous être patients pour l’accompagner à redonner? 
Une mère qui allait au travail, une conjointe se préparant avant de partir, un père lui-même sur la route pour sa journée et une petite sœur en voie d’affronter la mi-session du cégep. Une journée qui semblait banale et parlait à la réalité de tous, où moins d’une heure plus tard, se sont retrouvés devant un fait. On nous a demandé de lui dire au revoir rapidement, puisque les pronostics n’étaient  pas positifs. Maman a chantonné une berceuse, papa lui a tenu la main, sa chérie lui rappelait qu’elle était là et je cherchais à rester forte près de lui. Nous étions tous à son chevet. Contre toute attente, il s’est stabilisé. On nous a expliqué par la suite qu'environ 10 % de son cerveau était encore « vivant », donc la fatalité ne pouvait qu’arriver. La question sur le don d’organes s’est présentée rapidement. 

Je crois que nous avions tous en souvenir un moment précis où, lors d’un repas de famille, nous parlions de l’après. Et qu’il avait été catégorique : « En tout cas, moi, si je meurs et que mes organes sont encore bons, vous donnez tout. » Il est normal d’hésiter lors de ce moment, que je ne souhaite à personne. Mais par contre, c’est de donner une chance incroyable et improbable de garder en mémoire la bonté et la générosité d’un proche. Nous avons dit oui, parce que c’était ce qu’il voulait. Et nous restons tous profondément reconnaissants d’avoir pu avoir cette conversation avant, parce que nous savions ce qu’il désirait. Que cela sauverait des vies. Et c’est important d’en discuter avec les siens, parce que cette simple question peut changer le cours d’une existence et donner de l’espoir à plus d’une personne. 

En attendant de trouver les receveurs, son ami avec qui il faisait de la musique nous a fait écouter un son qu’ils avaient travaillé ensemble. Un moment paisible et marquant, où nous pouvions encore partager cette passion avec lui. Lorsque l’heure de l’amener à la table d’opération est arrivée, une majeure partie du corps médical de l'Hôpital Sacré-Coeur à Montréal a longé les murs du couloirs menant jusqu’à l’ascenseur en signe de respect pour ce héros. Nous avons chanté Hallelujah, accompagnés de la douceur et de l'empathie de tous ces gens qui vivaient notre peine, mais qui rendaient honneur à ce beau bout d’homme dont la musique était toute sa vie. 

Plusieurs lui ont sauvé ce qui lui a permis d'être un sauveur de vies : un collègue attentif et réactif qui a effectué les premiers secours, des passants qualifiés comme premiers répondants et du personnel hospitalier réceptifs à la situation. C'est aussi grâce à eux, qu'il et nous avons pu donner à d'autres. Un cœur, deux poumons, deux reins, un foie, un pancréas et plusieurs tissus dont la cornée. Sept organes, pour six vies changées. Nous avons tous une histoire à raconter, l’écrire sur une carte ne suffit pas toujours… Serez-vous prêts à parler de vos volontés à vos proches? Sachez qu’à ce jour, la continuité dans sa finalité m’a permis de vivre plus doucement le deuil de mon super-héros depuis toujours : mon grand frère.

Joannie

« Le vrai courage se trouve dans des situations que nous n'avons pas choisies. » 

C'est une phrase qui me tourne dans la tête lorsque le désir d'abandonner me prend en expédition notamment lorsque j'ai fait l'ascension du mont Logan au Yukon en 2020 avec mon coéquipier Bruno-Pierre Couture. Il s'agissait de la plus haute montagne du Canada. Les tempêtes et le froid glacial ne nous ont pas empêchés d'atteindre notre objectif par une voie suspendue en dessus des glaciers sur l'arête Ouest et ensuite d'y enchaîner l'ascension de la deuxième plus haute montagne au Canada, le mont St-Élias, par la face Nord. 

Tout au long du trajet, un drapeau Chaîne de vie dans ma poche gauche me rappelait le courage et les nombreux défis auxquels les personnes en attente d’une greffe font face. Oui, il en faut du courage...

J'aime la métaphore entre l'ascension d'un sommet et Chaîne de vie, car c'est un pas à la fois, une personne à la fois et un don à la fois que nous allons faire avancer la cause du don d'organes et de tissus.

Rappelons-nous que chaque greffe est un « sommet » atteint!

Frédéric Dion